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mercredi 16 août 2023

Le cheval, la femme, le consentement au festival des arts équestres libres


Sous le titre "A cheval, Simone!", le festival des arts équestres libres qui se tiendra à Bioussac en Charente, au théâtre du cheval bavard, les 26 et 27 août prochains aura pour thème les femmes et les chevaux. Un sujet brûlant puisque les femmes représentent 85% des cavaliers-ères. Pour Galliene Tonka, organisatrice du festival, notre rapport aux chevaux reflète notre rapport au monde. "Celui-ci est-il fondé sur la domination et la contrainte, ou bien sur le consentement? " 

Une question que nous devons tous et toutes nous poser car on observe des parallèles dans la façon de traiter les femmes dans la société et les chevaux dans le monde équestre. Les analogies sont nombreuses : rapports de pouvoir, soumission, recherche d'un faire valoir, dictature de la beauté, baillonage, vocabulaire irrespectueux...  

Photo Ollaf Wisser
Pour commencer, prend-on le temps de demander son consentement au cheval? Et les femmes? Est-ce qu'elles continuent de soumettre les chevaux comme on leur a appris ou établissent-elles de nouveaux rapports fondés sur le respect, la complicité, l'attention?

"Les hommes sont les bienvenus car on les aime" s'amuse Galliene qui ne veut surtout pas faire un "me too du poney". Avec des tables rondes, des leçons en public, des ateliers, un spectacle, le festival des arts équestres libres nous invite à réfléchir, analyser, proposer. Une belle occasion de prendre conscience de l'amour qui nous unie à nos compagnons à sabots et des possibilités infinies du respect mutuel.

Lien pour faire un don au théâtre du cheval bavard

Page Facebook du festival




mardi 4 juillet 2023

Un jeu pour passer tes Galops

 

Un jeu pour réviser les Galops

Passe tes Galops d'abord! Pas toujours facile pour les enfants qui n'ont pas envie de se retrouver à l'école au poney club. Pour apprendre le programme des Galops 1 et 2  en s'amusant, voilà un nouveau jeu qui aborde toutes les questions du programme officiel des examens fédéraux d’équitation. Joliment illustré, il est composé d’une centaine de cartes et d’un livre illustré pour faire le plein d’informations sur les chevaux et les poneys. On peut y jouer seul ou à plusieurs. Chacun pioche à tour de rôle une carte dans chaque catégorie : Vie du cheval, Soins, Connaissances, A pied, Équitation. Dans chaque catégorie, il ou elle trouve quatre niveaux de questions distribuées de façon aléatoire. L’objectif est d’obtenir le plus de points possibles. Illustré par Fanny Ruelle et rédigé par Antoinette Delylle, ce coffret vaut 10,95 euros. A pratiquer sans modération ! Et à offrir aux enfants, aux petits enfants, aux grands enfants etc.

Avec des cartes et des questions pour tester ses connaissances

Un livret qui résume le programme


mardi 20 juin 2023

Nouvelle à lire : Attention, cheval marrant!

  Voici ma nouvelle lue par Victoria Diez et Antoinette Delylle dans le cadre de la Degust' des Mots, lectures musicales sur le Bassin d'Arcachon, accompagnées au piano par Amandine Mastellotto et par Céline Parisot au violoncelle.

 

Les chevaux ne demandent qu'à interagir avec nous et nous faire rire!

 

  Je m’appelle Rebelle. Non que je sois particulièrement révolté, mais je suis né l’année des R. J’aurai aussi bien pu m’appeler Renaud, Riri et même Rillette comme ma voisine de box. Rebelle, c’est classe. Tout de suite, j’en impose !

 

  Dix ans que je suis installé, là, dans le premier box du centre équestre. Autant dire que rien ne m’échappe. Le matin, au réveil, j’attends bien sagement mes granulés. Je salue Fred le palefrenier d’un petit hennissement mélodique et je vais mettre la tête dans ma mangeoire. S’il est en retard, je suis le premier à donner le signal du grand tintamarre. Bing, je balance des coups d’antérieur dans ma porte ! Tous les autres chevaux m’imitent. Faut voir Fred arriver tout essoufflé en râlant. Ça lui apprendra à faire la grasse mat ! Nous on est au bord de défaillir. Presque douze heures qu’on n’a rien mangé, une éternité ! Notre estomac crie famine. On se jette sur nos granulés comme des forcenés.

 

  Quand Fred revient avec sa brouette, je suis en train de lécher le fond de ma mangeoire. S’il est de bonne humeur, il me fait une petite caresse sur l’encolure avant de prendre sa fourche pour nettoyer mon box. Sinon, je me tiens bien à l’écart pour ne pas le gêner et surtout ne pas me prendre un coup de fourche. Ils sont tellement maladroits ces bipèdes ! J’adore le moment où Fred paille mon box. Quand je vois tous les petits brins odorants que je vais pouvoir trier avec minutie afin de choisir les plus goûteux, j’en salive de plaisir ! Cela va me prendre plusieurs heures. J’entends Fred qui flatte ses chevaux préférés et ronchonne contre ceux qui ont sali leurs boxes. C’est drôle comme les hommes voudraient toujours que nos boxes soient parfaitement rangés le matin. J’aimerais voir leur chambre !

 

  Après ce bon petit déjeuner, souvent, je me couche. Ma litière est encore bien moelleuse. Je ne dors pas forcément mais je me prélasse. Puis, je vais dire bonjour à ma voisine de box, la belle Diana du Grasset. Drôle de jument ! Elle allonge l’encolure le plus possible pour venir me renifler et… elle couine. Puis, elle revient et essaie de me toucher avec son nez. Mais nos boxes sont un peu trop éloignés ! Je me demande quand les hommes vont enfin comprendre qu’on a besoin de contacts ! Et encore, on a de la chance, au centre équestre, ils ne nous ont pas mis de grilles !

 

  Les enfants m’adorent, enfin... sauf les débutants. Ceux-là, je les crains autant qu’ils me craignent ! Je ne supporte pas qu’ils utilisent mon dos pour « taper leur cul » comme ils disent. Cela me pince trop. J’essaie de me retenir mais au bout de trois ou quatre secousses, je pars en sauts de mouton. Et paf, dans le sable, le cul qui me tape sur le dos ! 

  Julie, la monitrice l’a bien compris. Elle ne me confie que des Galops 3 minimum. 

 

  Les Galops, c’est ainsi que l’on nomme les humains à l’écurie. Les débutants et les Galops 1 sont très reconnaissables. Ils arrivent au club avec une cravache. C’est la première chose que leurs parents leur offrent. Avant même les bottes ! Il y en a des roses, des dorées, des brillantes... Certaines se terminent par une petite main, je ne comprends pas bien pourquoi. Les Galops 1 ne nous connaissent pas mais on leur a dit de venir armés. Moi, je m’évertue à leur apprendre les bonnes manières. Pas touche ! 

 

  Les Galops 2 et 3 sont plus sympas. Ils sont tombés amoureux de nous et veulent vraiment continuer. Ils ont encore un peu peur de moi surtout si je mets mes oreilles en arrière. J’en profite pour couper les coins, repasser au trot, voire me planter au milieu du manège pour discuter avec mes copains. « Petit branleur ! » dit Julie.        Quand mes Galops me parlent gentiment, j’essaie de leur faire plaisir. Je galope doucement pour ne pas trop les secouer, j’enjambe les petits obstacles pour ne pas les déstabiliser… bref je me transforme en monture modèle. Les Galops 4 sont mes préférés. Ils ont une bonne assiette, ne s’agitent pas sur mon dos et ne me demandent pas grand-chose. Assiette, vous avez bien lu. Assiette comme assise. Elle se travaille tous les jours. Elle est tellement précieuse pour nous et pour les cavaliers. Une bonne assiette qui accompagne onctueusement nos mouvements et notre dos est préservé.

 

  Avec les Galops 5, 6 et 7, tout change ! L’équitation devient un sport (pas encore un art !) Il faut toujours aller plus vite, sauter plus haut et faire des drôles de choses comme croiser les antérieurs, tordre ma tête à droite ou à gauche. Parfois, je ne comprends rien à ce qu’un Galop 6 me demande surtout quand il met des jambes tout en tirant sur ma bouche. C’est contradictoire, non ? Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? Franchement, je ne vois pas ! Alors, je tire moi aussi, ce qui me paraît le plus logique. Je tire, il tire, je tire, il tire… Et à un moment, il tire un peu plus fort. Aïe, cela fait trop mal ! Si ça continue, il va m’arracher les dents ! Je pile. Et voilà mon cavalier qui fait un vol plané ! Là, tout s’arrête ! Plus personne ne tire ! C’était peut-être cela que j’aurai dû faire dès le début. Mais alors ? Pourquoi a-t-il l’air mécontent ? Il faudra que je réfléchisse dans mon box.

 

   On a énormément de temps pour réfléchir nous les chevaux ! On a aussi du temps pour les observer, les Galops. On les épie à longueur de journée. Ils sont tellement drôles ! Dès qu’on les voit arriver avec les mallettes de pansage, les casques, les selles, les tapis, les protège-dos, les filets, les cravaches, la graisse à sabots… on a envie de rire. Il y a toujours quelque chose qui tombe où qui manque ! Le plus rigolo, c’est quand l’un d’eux laisse le matériel à notre portée. Personnellement, j’ai un faible pour le filet. Rien n’est plus agréable à mâchouiller que les rênes ou la muserolle, surtout si le cuir est bien vieux et huilé. 

 

  Comme nous, ils ont chacun leur style et leur personnalité. Devant mon box, je vois défiler les frimeurs, les timides, les gentils, les sportifs, les rêveurs, les cascadeurs… Quand je tombe sur un cavalier qui se prend pour un caïd et me considère comme une mobylette, je sors le grand jeu. Cela commence au pansage. Si j’ai l’occasion, je lui marche sur le pied, histoire de remettre chacun à sa place. Quand il me sangle, je fais semblant de mordre. Sur la carrière, je joue à me faire peur et je fais des écarts aux endroits où hier encore, je passais tranquillement avec un débutant sur le dos. J’adore impressionner les chauffeurs de mobylettes ! Et je réponds au coup de cravache par un coup de cul d’intensité proportionnelle. Pas besoin de faire des mathématiques à l’école pour savoir calculer mes réponses. Je dose, moi ! Au fond, je suis toujours gagnant quand on me cherche. J’ai plus de force que n’importe quel humain même costaud et surtout, mes réflexes sont bien plus rapides ! 

 

... Julie est adorable. Elle prévient mes jeunes cavaliers. « Avec Rebelle, pas besoin de cravache. Il répond au claquement de langue et au souffle de ta botte ». Oui, je réponds au souffle, pas aux coups de talon ! Voilà pourquoi Julie me confie de préférence à ses meilleurs cavaliers, aux plus sensibles. Comme j’adore faire des bêtises, elle a mis un auto-collant sur mon box : « Attention, cheval marrant ! » Je cache les brosses sous la paille, je marche sur le tuyau d’arrosage pendant la douche, je ferme la bouche quand on me met le mors... Bref, je m’amuse bien. Julie ne me gronde jamais. Au contraire, elle m’encourage. C’est bien qu’elle dit. Tu es le plus intelligent des chevaux, mon Rebelle d’amour. Et elle me fait des caresses, elle m’emmène brouter. 

  Personnellement, j’ai mes cavalières préférées, toutes des filles, plutôt timides qui m’aiment pour moi-même. Elles m’appellent « Bébé », « Chouchou d’amour », « Nounou »

 

   Bref, je suis le chouchou, enfin j’étais car tout a changé. Les écuries ont été rachetées, Julie a démissionné. Elle a été remplacée par Madame Rentabilité. Je suis tellement triste que Julie parte que je ne veux plus travailler. Je reste la tête basse, l’œil mort, refusant de manger. Madame Renta (c’est comme ça qu’on l’appelle) a décrété que je lui fais une mauvaise publicité. Elle m’a changé de box pour me mettre tout au fond, là où les parents ne peuvent plus me voir. Quand Fred , mon palefrenier préféré, est venu me chercher, il avait l’air triste lui aussi. Il s’est même excusé de me séparer de ma Diana bien aimée. J’ai quitté mon box aux premières loges pour un réduit au fond de la grange. Je n’ai pas de voisin et je ne vois plus la cour. 

 

  J’ai beau taper dans les murs, hennir à n’en plus finir, personne ne vient à mon secours. J’entends Diana me répondre et je suis encore plus triste. Non, plus que triste. J’ai la rage. Et peur aussi. Je ne me sens tellement seul. Je tourne en rond dans mon réduit obscur. Je deviens fou.

C’est comme ça que je suis devenu un cheval difficile. Madame Renta oublie mon existence et je reste enfermé parfois trois jours de suite. Quand je sors enfin, j’ai une envie furieuse de fuir. Partir le plus loin possible. Je galope, je galope furieusement en oubliant complètement mon Galop du jour. Alors, ils me mettent des mors de plus en plus durs, des gourmettes très serrées, des muserolles qui m’empêchent de respirer... Mais dès que je sors de mon réduit, je bouscule tout sur mon passage. Je fuis. Je veux rejoindre Diana. Retrouver mon box. Alors, Madame Renta crie très fort. Elle m’envoie un Galop 7 pas marrant du tout qui m’attaque avec ses éperons. Coups de cul suivis d’un demi-tour fulgurant, il est par terre en moins de cinq minutes. Il l’a bien cherché, non ?

 

  C’est de plus en plus difficile de m’attraper. Fred doit ruser jusqu’au jour où je lui échappe. Je bouscule Madame Renta qui pique une colère et décide d’appeler le camion. Le camion, quel camion ? Mine gênée de Fred qui détourne son regard. Tiens, le voilà. Deux hommes en descendent, l’air pas commode. Ils portent des balais et une grande corde. Les deux hommes ne me regardent même pas. L’un tient ma longe, l’autre me donne des coups de balais. Je transpire, je respire vite. J’ai tellement peur que je monte sans même faire le mariole.

 

   La peur, elle habite le camion. Elle le signe de son odeur acide qui se mélange à celle de l’urine. Tête basse, j’ose à peine regarder mes compagnons hagards et apeurés. Une jument de trait suitée avec son petit, deux autres poulains à peine sevrés, des vieux chevaux atteints d’affections aux membres et aux yeux. Je prends ma place aux côtés d’un trotteur qui me raconte une histoire de chrono qu’il n’a pas fait. Il n’a pas été qualifié. Il n’ira pas au champ de course. C’est son dernier voyage. Comme nous, à ce qu’il parait. Je n’y comprends rien. On va où là ? Elle est où Julie ? Et les enfants ? Les Galops ? Les filles qui m’appelaient Bébé ? 

 

  Je gratte le sol, j’appelle, j’étouffe. Les poulains me jettent des coups d’œil inquiets et se serrent contre les vieux. A vingt-deux ans, Sultan, cheval de club n’a jamais voyagé et a du mal à garder l’équilibre. A ses côtés, un frison au dos creux qui a dû être magnifique à son heure de gloire. Son Galop n’a pas l’argent pour lui payer sa retraite au pré. Au fond du camion, une jument borgne. Ancienne championne de dressage, elle donne des coups de dents à son voisin, le poney pie quand il s’approche de trop près. A chaque coup de frein, le pauvre poney est rejeté contre elle et se prend une chique. Résigné, il ne réplique même plus. A quoi bon ?

 

  Le camion s’arrête. Les hommes aux balais m’ont entendu. Ils vont me délivrer. Le moteur est maintenant coupé. Il fait de plus en plus chaud dans la bétaillère. De l’eau, il faut que je boive. J’entends des voitures s’arrêter. Des hommes descendent. Ils discutent avec les balais. Je les entends crier, se menacer. J’ai de plus en plus de mal à tenir debout. Je lutte pour ne pas m’affaler sur le sol comme le poulain. Trop peur de me faire écraser par les autres. 

 

  Le camion repart. Les voitures aussi. Je n’ai plus la force d’hennir. Juste rester debout. Debout pour ne pas crever. Mais où on nous emmène ? La percheronne essaie de relever son poulain en lui donnant des petits coups de nez. Il retombe aussi vite. Le trotteur me pousse contre la porte. Il va m’écrabouiller. Je résiste. Mes dernières forces. Surtout ne pas tomber. Dormir oui, mais debout. Rêver aux vertes prairies, à mon box premières loges, à Julie, Diana, Fred...

 

  Un grand coup de frein m’envoie sur les bas flancs. Des cris, des applaudissements. La porte du camion s’ouvre. Des jeunes portant des blousons violets, un masque assorti, une casquette et des lunettes noires nous détachent. Les télés, les radios, les photographes, tout le monde veut prendre notre image. J’entends les mots « Hold Up », « Sauvés », ‘Halte à l’hippophagie », « Fermons les abattoirs », « Manger un animal, c’est un meurtre » ... 

J’essaie de comprendre. Les jeunes en violet sont des animalistes. Ils ne veulent pas que l’on soit mangés. Ils ont détourné notre camion en partance pour l’abattoir pour nous relâcher dans la nature. Ils militent contre l’exploitation des chevaux. Ils pensent que l’on est maltraités dans les clubs équestres. Il ne faut plus nous faire travailler. Ils veulent fermer les champs de course, les terrains de concours de sauts d’obstacles, les écoles d’équitation, les théâtres équestres... Quelle tristesse !

 

  On se blottit autour de la percheronne. Je mangerais bien quelques granulés ou du foin. Et l’eau, quand vont-ils enfin y penser ? Les violets discutent sur la nécessité de nous nourrir ou pas, au moins ce soir. Ils votent à main levée. Pas d’eau, pas de nourriture, pas de couverture. On doit revenir à l’état de nature. Les chevaux les plus vieux ont compris. Ils font quelques pas vers les prés en boitillant. J’apprends que l’on est au cœur de la Lozère et que l’on participe à une action de remise en liberté des animaux de rente mais aussi des animaux de compagnie. J’entends au loin une cavalcade. D’autres chevaux sont déjà là. Comment vont-ils m’accueillir ? 

 

  Durement ! Je me fais mordre, je prends des coups de sabots mais je réplique et surtout, je fuis, je me cache, j’évite de me mettre sur leur passage. Pas question de faire le malin. Profil bas. La percheronne a, la première, trouvé le point d’eau. On la suit partout mais son poulain est mort. Le trotteur et les deux jeunes ne me quittent pas. On doit prendre des forces. Il pleut sans discontinuer. Mes poils se hérissent. Ils n’ont pas eu le temps de pousser et ne me protègent pas suffisamment. Je grelotte. Mes fers me font souffrir. Ils me rentrent dans les sabots. Les violets n'ont pas pensé à me les enlever. J’essaie vainement de les arracher.


"Attention, cheval marrant!" a été lu à l'occasion de la Degust'des Mots


 

  Bientôt il neigera. Je guette la venue des hommes aux balais. Jamais ! Ils ne me reprendront ! La nuit, planqué derrière un buisson, j’ai la nostalgie de mon écurie. Les enfants me manquent. Mes propres blagues me manquent. Je repense aux brosses que je subtilisais, aux demi-tours que je réservais aux Galops prétentieux, aux carottes que m’apportaient mes petites cavalières. Je rêve de les emmener galoper dans la neige vierge par une matinée ensoleillée. Je suis libre mais je ne sers plus à rien. 

 

  Et soudain, le bruit d’un moteur. Je tends l’encolure aux aguets. Non, ce n’est pas le camion. Inutile de se sauver. On dirait plutôt un bus, oui, un autobus rouge. Des enfants descendent en se lançant des boules de neige. Ils rient aux éclats. La maitresse les fait taire. Ils doivent se tenir silencieux pour nous approcher, nous les chevaux sauvages.

 

  Des enfants ! Enfin ! Plus besoin de me cacher. Alors, je joue. Je joue à avoir peur, je joue à les faire rire, je fais des glissades... Je fais mon Rebelle. Je redeviens le cheval marrant... Enfin... pour l’instant. 


Copyright Antoinette Delylle


A lire dans l'Estey Malin, le journal du Bassin d'Arcachon


 

 

samedi 4 février 2023

Jumping de Bordeaux : ultime victoire de Punch de l'Esques

Grand moment de communion autour du cheval de 20 ans
A 20 ans, Punch de L'Esques remporte le Devoucoux Indoor Derby

Punch de l'Esques et Karim Laghouag remportent le Devoucoux Indoor Derby dans une ambiance de folie au Jumping International de Bordeaux. A 20 ans, le bel alezan qui ne fait absolumment pas son âge part à la retraite. Il reste dans la famille de Karim et fera des balades. Pour sa dernière apparition, il a déchainé la ferveur du public.
Karim a voulu des adieux joyeux pour celui qu'il appelle Monsieur Plus. "C'est un cheval exceptionnel pourvu qu'on ne le prenne pas de front", raconte Karim Laghouag. Il a beaucoup de caractère, demande du feeling et ne supporte pas les remises de prix. Avec son 1,63 mètre, il a le coeur plus gros que tous les spectateurs réunis". Malicieux, souple comme un chat, Punch est en osmose avec son cavalier. "Il est dans ma tête. Je regarde à gauche, il va à gauche. Je serre les fesses parce que j'ai peur de toucher un obstacles, il saute un mètre au-dessus".
Une carotte pour le remercier et...  le faire tenir en place!

 Le Directeur National Technique Michel Asseray lui a également rendu hommage en se mettant dans la peau du champion. "Ce que j'aime le moins, c'est le dressage, cette discipline où le gars sur toi change d'avis en permanence... Cela me rend dingue. Je préfère activer le mode fusée et partir sur le cross. Karim doit s'empêcher d'anticiper de tourner, sinon je tourne avant! J'ai mes caprices de star. Je veux qu'on me donne à manger en premier, ou alors je retourne mon box. Je ne supporte pas que le camion parte sans moi en concours. D'ailleurs, j'ai besoin de personne pour me tenir. Je monte tout seul dedans! Je n'ai jamais voulu être vendu. J'ai toujours réussi à faire capoter l'affaire

Départ à la retraite au sommet de sa gloire

Je ne suis pas un cheval facile". Le bel anglo-arabe tire donc sa révérence avec un palmarès bien rempli et un état de forme magnifique. Cela fait plaisir!

Ambiance de folie au Jumping de Bordeaux


dimanche 4 décembre 2022

Première édition pour la Degust' des Nouvelles

Des mots doux, des mots qui tuent, des mots qui font mouche, des amours de mots... Ils ont été célébrés, dits, chantés par Victoria Diez et moi même, devant un public chaleureux, pour nos premières lectures musicales à la bougie au Centre Equestre d'Andernos-les-Bains. Le cheval et les animaux étaient à l'honneur. Je posterai bientôt les nouvelles concernant les chevaux.

lundi 24 octobre 2022

Bartabas nous emmène en Irlande au théâtre équestre Zingaro

 

Cabaret de l'exil au Théâtre Equestre Zingaro. Photo Hugo Marty

Pour rien au monde, on ne raterait le rituel. On arrive un peu en avance pour manger un morceau, attendre que le cardinal sonne la cloche pour avancer vers la scène, retrouver les garçons de salle "historiques", les dindons, le forgeron (en kilt cette fois), l'éclairage aux bougies, l'orgue, la boisson revigorante et ... se préparer avec impatience pour le cérémonial que nous réserve Bartabas.

 Pour le deuxième volet de son triptyque "Cabaret de l'exil", il nous emmène en Irlande, sur les traces des "Irish Travellers". Encore appelés "Tinkers" parce qu'ils rétamaient les casseroles (en anglais étain se dit "tin"), ce sont des nomades mais autochtones. Ils circulent sur des roulottes tirées par des irish Com, Gypsy Com et Tinkeb, Gypsy Vanner. Sur les routes, ils baladent leur monde de contes, de chansons, de croyances, de prières. Autrefois, ils étaient très attendus dans les villages. Aujourd'hui, ils sont victimes d'une forte discrimination. Bartabas leur rend un hommage à la fois joyeux et nostalgique au travers des chansons de Thomas Mc Carthy. 

De tableau en tableau... Photo Hugo Marty

Fougueux, le spectacle nous transporte de surprises en surprises. On retrouve la patte du maître d'Aubervilliers, la voltige, les masques, le feu, la mule et l'âne, les attelages pittoresques... Rien n'est neuf. Tout renait! C'est ce qui fait la force, la puissance et le charme de ce spectacle réalisé dans le respect des chevaux. Pas d'exhibition, ni de démonstration. Juste de la joie, de la beauté, de l'humour. 

On ressort heureux, content d'échanger avec les autres spectateurs autour du grand feu. Comme les travellers aimaient le faire. 

Partir en voyage à Aubervilliers et se retrouver en ... Irlande!

jeudi 1 septembre 2022

Le festival des Arts Equestres Libres à Bioussac

 

La magie d'un cheval libre

Ambiance légère, poétique et libre au festival proposé par Galienne Tonka et son Théâtre du Cheval Bavard, les 27 et 28 août dernier à Bioussac, en Charente. Au programme : des tables rondes avec, entre autres, Patrice Franchet d'Esperey, ancien écuyer du Cadre Noir, Arlette Agassis, fondatrice de l'équipédagogie, Jean-Claude Poëncet, consultant en agroécologie et biothérapies animales... 

Bavardages à Bioussac

On y a discuté de nos peurs et des peurs des chevaux. D'après Jean-Claude Poëncet, la peur n'existe pas chez les peuples primitifs qui ne craignent ni la grande forêt ni la nuit car ils connaissent les esprits qui y habitent. 
Pour Galienne Tonka, la confiance doit être réciproque

Quant aux peurs des chevaux, elle se traite par la confiance. La confiance se mérite pour le bipède que nous sommes et nous devons y travailler à chaque instant. 

Être dans l'instant, c'est la clé

C'est la raison pour laquelle Galienne Tonka ne gronde jamais ses chevaux. Elle ne leur dit jamais "Non"! "S'ils se trompent, je les félicite et je reformule ma demande. Ainsi, le cheval a envie de faire et de bien faire. De toute façon, il ne sait pas distinguer ce qui est bien et mal. Il cherche son confort et sa sécurité". Galienne crée une bulle de bien-être et de gentillesse autour du cheval. Elle exprime une profonde empathie envers lui.  Quand il se détend, c'est gagné! "Toutes les pathologies viennent de la contrainte" poursuit Jean-Claude Poëncet. Bref, il faut accepter que le cheval nous dise Non. 

Une montagne de pacifisme!


Démonstration dans le manège où Galienne fait travailler ses élèves en essayant des choses, en riant, en osant, en remerciant les chevaux... 

La porte est signée de l'artiste Liska Llorca


Puis, atelier de danse orientale pour travailler l'indépendance des aides, sophrologie pour la détente et leçon de piano pour oser. 

Exercice de danse avec les ailes d'Isis pour délier les mains


Le spectacle du soir reste dans le ton, léger et poétique avec notamment le duo entre Catherine Schneider, pianiste, compositrice et Âanis, croisé allemand-lusitanien qui montre sa gratitude. Oui, Âanis ose déborder de tendresse. Il s'exprime. Un vrai bavard ... 

Le cheval et la pianiste, un duo bien accordé

Au théâtre du Cheval Bavard, on se parle!  

dimanche 21 août 2022

Mon cheval s'énerve. Comment faire baisser la pression?

  Le cheval monte très vite en pression. Mais il redescend tout aussi rapidement  si son cavalier sait s’y prendre. Le mieux, c’est de désamorcer la montée le plus tôt possible. 

La tension monte, monte. Il fait le gros dos, tend l’encolure ou, au contraire, s’enroule pour échapper à la main et… soudain, au moindre prétexte, votre cheval explose. Il se cabre, part en coups de cul, fait du rodéo, improvise un demi-tour de la mort ou tout simplement s’échappe au triple au galop. Les raisons sont multiples. Parfois, il panique. Ou bien, il a trop de tension et l’irrésistible besoin de s’exprimer. Il ne se dépense pas assez. Ou encore il fuit un grand danger (vous ?) Qu’il soit sur l’œil ou trop chaud, la situation est tendue et votre sécurité franchement pas assurée. Vous n’avez plus de prise. Il ne vous entend plus. A peine si vous existez encore à ses yeux !

 

Mollir dans les mains, laisser passer le mouvement et sourire pour faire baisser la pression

Pour éviter d’en arriver là, mieux vaut anticiper. Renaud Subra est comportementaliste et s’occupe de chevaux difficiles dans la région bordelaise (Alter Horse). Il a récemment été appelé pour un cheval qui panique. « Pas un cheval méchant, un cheval qui monte en pression quand il se sent coincé, enfermé et qui, dans ce cas, est capable de tout casser, explique-t-il. Il pourrait même se tuer ! » Le voir travailler ce cheval au bord de la crise de nerfs est une leçon de zénitude ! Sa patience semble inaltérable. Sans cesse, il le rassure, le guide, l’encadre. « Il faut prendre conscience de l’anxiété du cheval. Il est comme un élastique. Au fur et à mesure du travail ou des difficultés rencontrées, il se tend, se tend. Il faut agir avant que ça pète ! »

 Plus vite on agit et plus rapidement, le cheval redescend en pression. Il faut donc être aussi alerte qu’un cheval ! Et Renaud Subra de donner les signes qui doivent faire réagir : le dos se tend ou se lève ; l’encolure se raidit ; les poils du poitrail se hérissent ; les mouvements deviennent raides ; le cheval développe plus de force physique pour le même résultat ; il se laisse moins diriger ; son visage se fige, sa bouche durcit, ses yeux deviennent fixes, ses naseaux respirent mais sans mouvement. 

 Une fois que l’on s’est assuré que le cheval n’a pas de problème physique, la solution consiste à lui mettre la tête en bas. « Que cela soit à pied ou monté, à la moindre tension, tête en bas ! Cela le décontracte naturellement et lui permet de retrouver un rythme respiratoire plus lent. De même, respirez lentement, profondément. Cela marche avec tous les chevaux ! » assure Renaud Subra. Respirer nous invite à détendre nos épaules. Notre poids du corps se trouve mieux réparti vers le bas.  Sans forcément en avoir conscience, le cavalier a trop souvent tendance à se raccrocher aux rênes au moindre problème. C’est le contraire qu’il faut faire. « Il faut tout de suite relâcher la bouche et travailler avec ses jambes et son assiette. Apprenez-lui à étendre son dos et baisser la tête. Cela procure au cheval un lâcher prise, une détente très agréable. Très vite, il la recherchera ». Vous pouvez, par exemple, employer le mot « cool » associé à des mains qui montent et qui suivent la bouche (pas des mains qui lâchent tout et abandonnent). « Il faut considérer le cheval comme un animal qui trouve sa dynamique dans le troupeau, explique Renaud Subra. Si lorsqu’il se tend par manque de confiance, vous lui apprenez à se détendre, vous devenez un bon partenaire pour lui. Il va rechercher votre compagnie et se sentir en sécurité à vos côtés ».  

 La tête en bas, c’est la clé ! Auteur d’une méthode d’éducation du cheval sans stress et grâce aux TTouch (effleurements, caresses…), Linda Tellington-Jones insiste sur une des leçons les plus importantes que le cheval doit apprendre : baisser la tête. « C’est une des conditions préalables à la suite du travail, explique-t-elle. En effet, s’il tient la tête levée, notre cheval n’est pas en mesure de réfléchir, ni de se déplacer de manière contrôlée, mais seulement de suivre son instinct qui lui dicte la fuite ». Pour l’américaine, quand le cheval baisse la tête, c’est comme s’il éteignait l’interrupteur instinct de fuite. Il peut alors se calmer, reprendre son souffle et attendre vos instructions. Linda Tellington-Jones propose différentes manières de faire baisser la tête à un cheval. Vous pouvez, par exemple, donner des signaux (légère pression) au niveau de la crinière avec la main droite et au niveau du licol avec la main gauche. 

 En selle, en cas de peur ou d’excitation, surtout ne tendez pas les rênes. Au contraire, détendez-les. Juge international de dressage, Bernard Maurel raconte qu’autrefois, pour faire baisser la pression, les écuyers de Saumur avaient pour consigne de marcher, le temps de fumer une cigarette. L’époque a changé mais le retour au calme par le pas rênes longues est toujours d’actualité ! « La performance est dans la décontraction, poursuit Renaud Subra. Il ne faut jamais rien demander à un cheval tendu. Il faut d’abord qu’il se détende. Cela nous apprend la patience mais le gain est énorme !  Le cheval n’est jamais mis en difficulté. Vous devenez un partenaire idéal. Or, les chevaux sont toujours en recherche de partenaires ».

L'expiration comme décontractant du cheval et du cavalier

 Olivier Pulls, écuyer du Cadre Noir, travaille sur le souffle. « Dès que mon cheval se met en alerte, je souffle. On n’imagine pas l’impact du souffle. Je lui ai appris à faire les transitions descendantes au souffle. Dès que je souffle, il sait que cela veut dire – tranquille, on se pose ! » A l’obstacle, avec un cheval qui monte en pression, Olivier Pulls souffle, comme le fait le grand Ludger Beerbaum. « Mais attention ! Je souffle de façon homéopathique car les chevaux perçoivent tout, précise Olivier Pulls. Une expiration trop forte pourrait les faire s’arrêter ! »

    Prôné par Sally Swift, créatrice de « l’équitation centrée », le regard doux réduit les tensions du cheval comme celle du cavalier. C’est ce que Michel Robert appelle « le regard panoramique ». Il consiste à relâcher son regard et à englober un champ de vision aussi large que possible aussi bien horizontalement que verticalement. « C’est presque une philosophie, explique Sally Swift. C’est une technique pour aiguiser notre perception, pour devenir beaucoup plus conscient de ce qui se passe autour de nous, en dessous de nous, à l’intérieur de nous-mêmes. Le regard doux permet de sentir et d’entendre tout autant que de voir ».  Le résultat ? « Un champ d’action plus vaste ; une perception plus aiguë de votre corps et de celui de votre cheval ; moins de tensions ; un mouvement en avant plus aisé et plus libre ». 

     

En position accroupie, l'humain n'inspire aucune crainte, plutôt de la curiosité

Un travail préalable à la longe ou en liberté dans un rond de longe ou un petit enclos permet de mettre un cheval chaud dans de meilleures conditions de travail. « Ce travail à la longe est à la fois une assurance de sécurité pour le cavalier et de conservation pour le cheval, qui aura ainsi, surtout s’il est jeune, le moral et le physique préservés d’une mise au travail trop brutale, explique l’éthologue Jean-Claude Barrey. Il arrive trop souvent que l’animal jetant un peu brusquement son feu d’écurie, le cavalier se crispe et cherche à garder le contrôle de sa monture en accumulant les oppositions de mains. Il débute ainsi le travail par un manque de cohérence qui désorganise les enchainements appris, crée du désordre et, remplaçant l’impulsion par de l’excitation, ouvre la porte aux défenses, puis à la rétivité ». 

 

Avec un cheval chaud, préparez bien vos demandes. Occupez-le. S’il se soucie d’un bruit ou d’un objet bizarre, ne vous en préoccupez pas. Passez au large comme si de rien n’était, en regardant où vous allez. Petit à petit, rapprochez-vous en regardant loin et en l’occupant (pli à droite, pli à gauche, entrée dans les coins, transitions…) S’il s’énerve, gardez votre calme. Mettez-vous en suspension et restez le plus neutre possible. Dès qu’il s’excite au galop, passez au pas. Faites un maximum de sorties à l’extérieur, en main ou en selle. Tenez compte de l’incroyable capacité du cheval à passer d’un état émotionnel à un autre. Il suffit de l’observer dans les pâtures. Il est calme et paisible, et, soudain, il dresse l’encolure, repère un mouvement suspect et prend la fuite. Il peut aussi juger qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter et retrouver son calme instantanément. Comme quand il est avec vous !

 

 

A lire

« L’équitation centrée » de Sally Swift. Editions Belin

 « La méthode Tellington » par Linda Tellington-Jones et Andrea Nobel. Editions Vigot

« Ethologie et écologies équines » de Jean-Claude Barrey et Christine Lazier. Editions Vigot.

« Le cheval juste » de Bernard Maurel. Editions Belin. 

« En intelligence avec son cheval ». Antoinette Delylle. Editions Vigot. 


Questions à Martine Berguay, créatrice de l’Actors Cheval, réseau des nouveaux rôles du cheval, formatrice et éleveuse de chevaux de loisir dans le Limousin

·      Comment réagir face à un cheval qui trottine tout le temps, se met en nage, ne s’arrête pas, se pointe… ?

·      Il faut se demander pourquoi le cheval est sous pression. Souvent, c’est parce que l’on a fait une erreur. On a été trop vite, trop loin. On a demandé trop longtemps. On n’a pas assez préparé l’exercice. On n’est pas cohérent dans ses demandes. On a été injuste. Ou bien, notre état émotionnel n’est pas stable et perturbe le cheval. Le cavalier doit sans cesse se remettre en question. C’est d’abord notre attitude qui met la pression. Le cavalier est souvent trop gourmand. Le cheval donne, donne et il demande encore ! 

·      On pourra analyser après mais sur le coup, que faire ?

·      Il faut essayer de rester calme et faire comme si on ne voyait pas cette pression. Si on est en selle, on peut le mettre dans un exercice qu’il connaît bien ou dire un mot familier. Il ne faut surtout pas utiliser la force. Il ne faut pas qu’il se batte contre nous mais qu’il s’en remette à quelqu’un de calme et de bienveillant. 

·      Parfois, la pression monte quand on rentre plus loin dans le travail…

·      Lorsque l’on éduque un cheval pour le spectacle par exemple, on est bloqué parce que la pression ne redescend pas. On ne peut plus progresser. Ce n’est plus de l’excitation au travail, c’est du stress. On a trouvé la limite. Il faut alors revenir en arrière. Si le cheval a vraiment trop de pression, il faut le laisser tranquille, arrêter l’exercice, ne plus rien lui demander. 

·      Que faire quand notre cheval s’énerve à cause d’un élément extérieur, des copains qui galopent dans les prés autour par exemple ?

·      Il suffit d’attendre que l’orage passe. C’est une excitation normale surtout si le cheval est jeune. Il ne faut surtout pas se fâcher. 

 

 

10 actions pour un retour au calme

1.     Souriez. Votre cheval sera moins stressé s’il vous sent de bonne humeur. Éclatez de rire. C’est le meilleur moyen de vous relâcher et de montrer à votre cheval qu’il n’a rien à craindre. Vous pouvez aussi chanter !

2.     Caressez son garrot. En selle, c’est un bon moyen de calmer ou de récompenser.

3.     Soufflez ! Cela vous décontracter en même temps que votre cheval. Cherchez à ralentir votre respiration.

4.     Accroupissez-vous si vous travaillez en liberté ou à la longe, Rentrez la tête dans vos épaules ou détournez le regard. 

5.     Faites-lui baisser la tête.

6.     Mettez-le dans une routine, par exemple toujours le même échauffement 

7.     Desserrez la muserolle. Serrée, elle empêche la décontraction de la mâchoire. Évitez les enrênements qui créent des tensions et ne permettent qu’un résultat artificiel.

8.     Enlevez vos éperons qui ne favorisent certainement pas la décontraction. 

9.     Emmenez votre cheval découvrir le monde à pied ou en selle. 

10.  Écoutez vos sensations. Essayez de comprendre ce que ressent le cheval. Guettez le moment où il a besoin d’étirer son dos et son encolure. 

 

lundi 15 août 2022

Au secours, mon cheval a peur!

 

Un plastique qui vole, une rafale de vent, un chien qui surgit, un camion qui pétarade… les raisons davoir peur pour un cheval sont nombreuses. Mais il peut apprendre à les surmonter et même à les oublier.

 

En cas de problème, sourire rassure autant le cheval que sa cavalière!

Ma jument Diana n’a peur de rien. Cest une guerrière habituéà sauter des obstacles, se balader en forêt, voir du monde, découvrir de nouveaux lieux de concours.  En toutes circonstances, elle est zen sauf… quand elle rencontre un âne ! Un petit âne gris qui broute tranquillement dans son pré et sapproche de la clôture au pas, sans aucune agressivité. Juste de la curiosité. Tétanisée, Diana ne veut plus avancer.  Elle respire fort, se met à ronfler.  Il faut deux ou trois passages pour quelle shabitue à ce « monstre aux grandes oreilles ».

Une méfiance naturelle

Le cheval se montre souvent peureux. C’est normal ! Pendant des siècles, la peur a assuré sa survie. Cest parce quil était capable de senfuir rapidement quil a pu échapper aux attaques des hyènes, des loups, des chacals, des hommes… Sa rapidité de réaction pouvait lui sauver la vie !  Il vit donc en permanence aux aguets. Grâce à sa prudence, il ne sest pas embourbé, a pu sabriter pendant un orage, a détecté l’odeur dun carnivore… Selon son caractère et la façon dont il a été élevé, le cheval domestiqué conserve son instinct de fuite et reste réactif aux bruits, aux odeurs et aux objets inhabituels. 

Vision panoramique

Le cheval ne voit pas tout-à-fait la même chose que nous. Ses yeux sont placés sur le côté, pas devant. Il dispose dun champ visuel panoramique de 360° pour repérer le danger. En contrepartie, ses capacitéà faire le point sont limitées. Il voit large mais pas dans le détail ! Il détecte mieux les mouvements que la précision dun objet. Pour examiner lobjet en détail, il  tourne lencolure et oriente sa tête selon un angle favorable. Sil est coincé par des enrênements trop serrés ou s’il est encapuchonné, il ne peut pas voir devant lui. Son mal-être peut être immense. 

Auteur de « Quand le cheval a peur », Véronique de Saint Vaulry résume bien la situation : « Un cheval qui a peur revient à l’état de nature et éprouve le besoin puissant de dérouler ses programmes naturels dexamen : regarder en face, prendre son temps, flairer. Le lui permettre, cest gagner du temps, et éviter les défenses ». 

Anticipons !

Plus on intervient tôt et plus on est efficace.  Le cheval envoie des signaux : sa face se fige, son encolure monte très haut et se durcit, sa respiration devient soufflante, voire ronflante, ses battements de cœur saccélèrent, ses naseaux se dilatent. Mollissez. Si vous vous contractez vous allez ajouter du stress. Caressez, rassurez. Laissez lui la liberté d’encolure. Acceptez l’immobilité prolongée. En cas de tentative de recul ou de demi tour, reprenez contact avec vos rênes mais sans tirer, puis mettez des jambes pour fermer lissue vers larrière. Dès quil est dans laxe, rendez les rênes. Dès quil arrête de reculer, cédez dans les jambes. Une fois quil sapaise à l’arrêt, vous pouvez demander un pas en avant. Caressezfélicitez. Récompensez chaque mouvement. Soyez patient.

 

Apprenez-lui à gérer ses peurs

Plus il sera confronté à des situations, moins il se stressera. 

À pied, désensibilisez-le en lui faisant voir, sentir, toucher toutes sortes dobjets (cravache, foulard, sac en plastique) Avec un regard doux et un grand sourire, caressez-le doucement avec cet objet. Agitez- le dans le même rythme que le mouvement d'une queue de cheval qui chasse les mouches. Une fois habitué, il n'aura plus peur de ce sacré sac qui le terrorise en balade. Lobjet inquiétant sera devenu un objet rassurant !

 De même, emmenez-le partout. Montrez-lui des voitures, prenez le thé devant son box, tapez sur un ballon… bref rendez-lui toutes sortes de situations familières. Si votre cheval est stressé par la venue du maréchal, un changement de lieu, lexamen du vétérinaire… donnez-lui une ration de carottes ou de foin. Rien de tel pour lui faire passer son stress pendant les soins. Mais il faut aussi l’éduquer. Apprenez-lui à rester immobile, donner ses pieds, se faire toucher partout… Veiller à bien le désensibiliser : agitez lentement et calmement un objet non familier devant lui (stick, tondeuse), dès qu’il cesse de bouger, arrêtez.  Petit à petit vous allez lui apprendre à bien réagir, par le calme. Au besoin, utilisez le renforcement positif : Récompensez quand il fait bien (caresse, carotte) et allez plus loin (contact, mouvements plus amples).

L’astuce Monchevalmedit

Quand votre cheval a peur, chantez ou éclatez de rire. Déjà, il va en déduire quil na pas de raison davoir peur. Ensuite, vous allez vous décontracter et donc, lapaiser. 

 Soyez stoïque

Il a peur de… votre peur ! Le cheval a besoin dun cadre sécurisant. Ce cadre est établi par son cavalier ! Vos doutes, vos peurs ne doivent pas transparaître. Sinon, le cheval perd ses repères et panique lui aussi. Rien nest plus contagieux que la peur ! De plus, un cavalier effrayé va avoir des actions crispées ou maladroites. Ce qui va alimenter la peur du cheval. Bref, cest le cercle vicieux ! 

Si, à un passage délicat, vous avez peur, plutôt que de paniquer mettez pied à terre. Précédez votre cheval et montrez-lui le chemin. Il va passer et vous deviendrez pour lui, une personne en qui il peut avoir confiance. Pour cela, choisissez le bon moment. « Si lon y prend garde, le cheval pourrait simaginer que ses refus ont le pouvoir de faire descendre le cavalier, explique Véronique de Saint Vaulry. Au point de lui faire prendre lhabitude de se bloquer résolument, jusqu’à avoir déclenché l’heureux évènement ! Pour éviter cela, il suffit de mettre pied à terre au moment exact où le cheval vient d’obéir à une demande, si petite soit-elle ».  Mais oui, même si les chevaux se montrent plus ou moins peureux, ils sont aussi  intelligents et ils apprennent vite ! 

 

Renaud Subra : devenir le référent de son cheval

Questions à Renaud Subra, comportementaliste, spécialiste des chevaux difficiles (Alter Horse Coaching)

-      Comment expliquer qu’un cheval ait une peur panique d’un âne ?

-      La peur est l’émotion la plus coutumière du cheval. Elle est inscrite dans ses gênes. Le cheval est néophobe. Il fait une carte d’identité, comme un tableau de son environnement proche et éloigné.  Si quelque chose de nouveau entre dans ce tableau, il peut en avoir peur. Pour l’âne, en l’occurrence, votre jument ne l’associait à rien de connu. Cette odeur, cet aspect, ces grandes oreilles… cela ne lui rappellait rien. D’où une peur qui peut tourner à la panique !

-      Comment l’éviter ?

-      Il faut réagir le plus tôt possible, dès les premiers signaux (« gel » ou agitation). Les chevaux ressentent énormément de choses à côté desquelles nous passons ! Si le cheval constate que son « référent » n’entend rien et ne voit rien, et surtout qu’il ne voit pas son cheval monter en stress, il ne peut pas lui faire confiance. Montrez que vous comprenez sa réaction et qu’il est en sécurité avec vous. Passez un peu plus loin, rassurez à la voix, surtout ne vous durcissez pas. L’essentiel est de maintenir la direction.

-      On voit souvent des cavaliers chercher à convaincre leur monture de passer avec un grand coup de talon ou de cravache…

-      Surtout pas ! Cela ne fait que renforcer la peur. Or, le cheval ne peut rien assimiler quand il a peur. Le pire, c’est de basculer dans la crise. Cela, il s’en souviendra ! Sa mémoire traumatique est forte.

-      Le calme c’est la clé ?

-      Exactement. Le cavalier est le référent : il n’a pas peur et il ne s’énerve pas. En revanche, il prend son temps. Passer devant l’âne se transforme en expérience positive. Si vous voulez que votre cheval vous fasse confiance, soyez zen. Le cheval a une excellente mémoire ; Il se souvient si vous l’avez aidé ou non dans un moment difficile. Quand une peur est bien gérée, elle est gérée définitivement.

-      Comment rendre les chevaux plus téméraires ?

-      En multipliant les expériences. Montrez leur des tracteurs, des camions, des poubelles…  Plus un cheval a d’expériences sociales, plus il sait gérer ses peurs. Un cheval qui vit au pré et n’en sort jamais aura peur de tout. Je suis souvent appelé pour des « chevaux de jardin » qu’on ne peut pas séparer ni faire sortir. Ils n’ont pas assez d’expériences sociales et sont facilement sujets au stress. Il faut les séparer petit à petit par un fil, puis en coupant leur paddock en deux, puis en les éloignant un peu plus. Petit à petit, on y parvient. Mais cela peut prendre des semaines ! Aussi, la désensibilisation permet d’habituer les chevaux à toute sortes de choses comme les sacs en plastique ou les parapluies. Cela ne veut pas dire  qu’il n’aura plus jamais peur d’un sac en plastique qui s’envole en pleine nature mais vous aurez plus de chance que cela se passe bien. 

-      Un autre élément qui stresse souvent les chevaux, c’est le vent. Comment leur faire gérer cette peur du vent ?

-      Le vent les désoriente car il amène des odeurs et des bruits qu’ils ne connaissent pas tout en enlevant les bruits et les odeurs familières. Beaucoup de chevaux se montrent nerveux en cas de rafales. Ce n’est pas le meilleur moment pour travailler ! Il faut alors les occuper, rendre le travail intéressant pour qu’ils se concentrent dessus. 

-      Vous utilisez la technique approche-retrait ?

-      Elle rend les chevaux curieux. Vous avancez vers l’objet qui leur fait peur et vous reculez. Vous faites cela plusieurs fois. Vous le laissez regarder, renifler. Au bout d’un moment, le cheval n’a qu’une idée : s’approcher de cet objet qu’à chaque fois vous lui retirez ! 

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