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lundi 15 août 2022

Au secours, mon cheval a peur!

 

Un plastique qui vole, une rafale de vent, un chien qui surgit, un camion qui pétarade… les raisons davoir peur pour un cheval sont nombreuses. Mais il peut apprendre à les surmonter et même à les oublier.

 

En cas de problème, sourire rassure autant le cheval que sa cavalière!

Ma jument Diana n’a peur de rien. Cest une guerrière habituéà sauter des obstacles, se balader en forêt, voir du monde, découvrir de nouveaux lieux de concours.  En toutes circonstances, elle est zen sauf… quand elle rencontre un âne ! Un petit âne gris qui broute tranquillement dans son pré et sapproche de la clôture au pas, sans aucune agressivité. Juste de la curiosité. Tétanisée, Diana ne veut plus avancer.  Elle respire fort, se met à ronfler.  Il faut deux ou trois passages pour quelle shabitue à ce « monstre aux grandes oreilles ».

Une méfiance naturelle

Le cheval se montre souvent peureux. C’est normal ! Pendant des siècles, la peur a assuré sa survie. Cest parce quil était capable de senfuir rapidement quil a pu échapper aux attaques des hyènes, des loups, des chacals, des hommes… Sa rapidité de réaction pouvait lui sauver la vie !  Il vit donc en permanence aux aguets. Grâce à sa prudence, il ne sest pas embourbé, a pu sabriter pendant un orage, a détecté l’odeur dun carnivore… Selon son caractère et la façon dont il a été élevé, le cheval domestiqué conserve son instinct de fuite et reste réactif aux bruits, aux odeurs et aux objets inhabituels. 

Vision panoramique

Le cheval ne voit pas tout-à-fait la même chose que nous. Ses yeux sont placés sur le côté, pas devant. Il dispose dun champ visuel panoramique de 360° pour repérer le danger. En contrepartie, ses capacitéà faire le point sont limitées. Il voit large mais pas dans le détail ! Il détecte mieux les mouvements que la précision dun objet. Pour examiner lobjet en détail, il  tourne lencolure et oriente sa tête selon un angle favorable. Sil est coincé par des enrênements trop serrés ou s’il est encapuchonné, il ne peut pas voir devant lui. Son mal-être peut être immense. 

Auteur de « Quand le cheval a peur », Véronique de Saint Vaulry résume bien la situation : « Un cheval qui a peur revient à l’état de nature et éprouve le besoin puissant de dérouler ses programmes naturels dexamen : regarder en face, prendre son temps, flairer. Le lui permettre, cest gagner du temps, et éviter les défenses ». 

Anticipons !

Plus on intervient tôt et plus on est efficace.  Le cheval envoie des signaux : sa face se fige, son encolure monte très haut et se durcit, sa respiration devient soufflante, voire ronflante, ses battements de cœur saccélèrent, ses naseaux se dilatent. Mollissez. Si vous vous contractez vous allez ajouter du stress. Caressez, rassurez. Laissez lui la liberté d’encolure. Acceptez l’immobilité prolongée. En cas de tentative de recul ou de demi tour, reprenez contact avec vos rênes mais sans tirer, puis mettez des jambes pour fermer lissue vers larrière. Dès quil est dans laxe, rendez les rênes. Dès quil arrête de reculer, cédez dans les jambes. Une fois quil sapaise à l’arrêt, vous pouvez demander un pas en avant. Caressezfélicitez. Récompensez chaque mouvement. Soyez patient.

 

Apprenez-lui à gérer ses peurs

Plus il sera confronté à des situations, moins il se stressera. 

À pied, désensibilisez-le en lui faisant voir, sentir, toucher toutes sortes dobjets (cravache, foulard, sac en plastique) Avec un regard doux et un grand sourire, caressez-le doucement avec cet objet. Agitez- le dans le même rythme que le mouvement d'une queue de cheval qui chasse les mouches. Une fois habitué, il n'aura plus peur de ce sacré sac qui le terrorise en balade. Lobjet inquiétant sera devenu un objet rassurant !

 De même, emmenez-le partout. Montrez-lui des voitures, prenez le thé devant son box, tapez sur un ballon… bref rendez-lui toutes sortes de situations familières. Si votre cheval est stressé par la venue du maréchal, un changement de lieu, lexamen du vétérinaire… donnez-lui une ration de carottes ou de foin. Rien de tel pour lui faire passer son stress pendant les soins. Mais il faut aussi l’éduquer. Apprenez-lui à rester immobile, donner ses pieds, se faire toucher partout… Veiller à bien le désensibiliser : agitez lentement et calmement un objet non familier devant lui (stick, tondeuse), dès qu’il cesse de bouger, arrêtez.  Petit à petit vous allez lui apprendre à bien réagir, par le calme. Au besoin, utilisez le renforcement positif : Récompensez quand il fait bien (caresse, carotte) et allez plus loin (contact, mouvements plus amples).

L’astuce Monchevalmedit

Quand votre cheval a peur, chantez ou éclatez de rire. Déjà, il va en déduire quil na pas de raison davoir peur. Ensuite, vous allez vous décontracter et donc, lapaiser. 

 Soyez stoïque

Il a peur de… votre peur ! Le cheval a besoin dun cadre sécurisant. Ce cadre est établi par son cavalier ! Vos doutes, vos peurs ne doivent pas transparaître. Sinon, le cheval perd ses repères et panique lui aussi. Rien nest plus contagieux que la peur ! De plus, un cavalier effrayé va avoir des actions crispées ou maladroites. Ce qui va alimenter la peur du cheval. Bref, cest le cercle vicieux ! 

Si, à un passage délicat, vous avez peur, plutôt que de paniquer mettez pied à terre. Précédez votre cheval et montrez-lui le chemin. Il va passer et vous deviendrez pour lui, une personne en qui il peut avoir confiance. Pour cela, choisissez le bon moment. « Si lon y prend garde, le cheval pourrait simaginer que ses refus ont le pouvoir de faire descendre le cavalier, explique Véronique de Saint Vaulry. Au point de lui faire prendre lhabitude de se bloquer résolument, jusqu’à avoir déclenché l’heureux évènement ! Pour éviter cela, il suffit de mettre pied à terre au moment exact où le cheval vient d’obéir à une demande, si petite soit-elle ».  Mais oui, même si les chevaux se montrent plus ou moins peureux, ils sont aussi  intelligents et ils apprennent vite ! 

 

Renaud Subra : devenir le référent de son cheval

Questions à Renaud Subra, comportementaliste, spécialiste des chevaux difficiles (Alter Horse Coaching)

-      Comment expliquer qu’un cheval ait une peur panique d’un âne ?

-      La peur est l’émotion la plus coutumière du cheval. Elle est inscrite dans ses gênes. Le cheval est néophobe. Il fait une carte d’identité, comme un tableau de son environnement proche et éloigné.  Si quelque chose de nouveau entre dans ce tableau, il peut en avoir peur. Pour l’âne, en l’occurrence, votre jument ne l’associait à rien de connu. Cette odeur, cet aspect, ces grandes oreilles… cela ne lui rappellait rien. D’où une peur qui peut tourner à la panique !

-      Comment l’éviter ?

-      Il faut réagir le plus tôt possible, dès les premiers signaux (« gel » ou agitation). Les chevaux ressentent énormément de choses à côté desquelles nous passons ! Si le cheval constate que son « référent » n’entend rien et ne voit rien, et surtout qu’il ne voit pas son cheval monter en stress, il ne peut pas lui faire confiance. Montrez que vous comprenez sa réaction et qu’il est en sécurité avec vous. Passez un peu plus loin, rassurez à la voix, surtout ne vous durcissez pas. L’essentiel est de maintenir la direction.

-      On voit souvent des cavaliers chercher à convaincre leur monture de passer avec un grand coup de talon ou de cravache…

-      Surtout pas ! Cela ne fait que renforcer la peur. Or, le cheval ne peut rien assimiler quand il a peur. Le pire, c’est de basculer dans la crise. Cela, il s’en souviendra ! Sa mémoire traumatique est forte.

-      Le calme c’est la clé ?

-      Exactement. Le cavalier est le référent : il n’a pas peur et il ne s’énerve pas. En revanche, il prend son temps. Passer devant l’âne se transforme en expérience positive. Si vous voulez que votre cheval vous fasse confiance, soyez zen. Le cheval a une excellente mémoire ; Il se souvient si vous l’avez aidé ou non dans un moment difficile. Quand une peur est bien gérée, elle est gérée définitivement.

-      Comment rendre les chevaux plus téméraires ?

-      En multipliant les expériences. Montrez leur des tracteurs, des camions, des poubelles…  Plus un cheval a d’expériences sociales, plus il sait gérer ses peurs. Un cheval qui vit au pré et n’en sort jamais aura peur de tout. Je suis souvent appelé pour des « chevaux de jardin » qu’on ne peut pas séparer ni faire sortir. Ils n’ont pas assez d’expériences sociales et sont facilement sujets au stress. Il faut les séparer petit à petit par un fil, puis en coupant leur paddock en deux, puis en les éloignant un peu plus. Petit à petit, on y parvient. Mais cela peut prendre des semaines ! Aussi, la désensibilisation permet d’habituer les chevaux à toute sortes de choses comme les sacs en plastique ou les parapluies. Cela ne veut pas dire  qu’il n’aura plus jamais peur d’un sac en plastique qui s’envole en pleine nature mais vous aurez plus de chance que cela se passe bien. 

-      Un autre élément qui stresse souvent les chevaux, c’est le vent. Comment leur faire gérer cette peur du vent ?

-      Le vent les désoriente car il amène des odeurs et des bruits qu’ils ne connaissent pas tout en enlevant les bruits et les odeurs familières. Beaucoup de chevaux se montrent nerveux en cas de rafales. Ce n’est pas le meilleur moment pour travailler ! Il faut alors les occuper, rendre le travail intéressant pour qu’ils se concentrent dessus. 

-      Vous utilisez la technique approche-retrait ?

-      Elle rend les chevaux curieux. Vous avancez vers l’objet qui leur fait peur et vous reculez. Vous faites cela plusieurs fois. Vous le laissez regarder, renifler. Au bout d’un moment, le cheval n’a qu’une idée : s’approcher de cet objet qu’à chaque fois vous lui retirez ! 

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