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lundi 10 décembre 2018

La légèreté à cheval : conseils, pistes, Nuno Oliveira, dressage, CSO...

Etre léger, c’est utiliser ses aides avec parcimonie mais aussi, ne pas peser sur le dos du cheval !

La légèreté permet de se faire oublier!
La légèreté, tout le monde en rêve, beaucoup s’en réclament et peu y parviennent.  Chacun quête cet instant merveilleux où le cavalier se fait oublier, tant ses aides sont discrètes. Il fait corps avec son cheval qui est à la fois décontracté et tendu. Il suffit de penser à une action et le cheval la donne. Dans un équilibre parfait, il est prêt à sauter ou à danser à la moindre sollicitation.

   
La légèreté a pour principe absolu le respect du cheval. C’est une philosophie, mieux un art de vivre et de monter selon lequel le cavalier ne contraint pas le cheval mais l’invite à effectuer tel ou tel exercice. Elle exclut tout recours à la force ou à des artifices coercitifs (muserolles serrées, enrênements…)
La légèreté commence à pied, au box ou dans le pré.  Présentez le licol à votre cheval, ne l’attrapez pas au lasso !  Dès les premiers contacts, vous êtes léger, souriant, bien équilibré.  Vous tenez votre dos, vous vous  déplacez avec souplesse. Vous êtes déjà dans l’ambiance  et votre cheval aussi!
Accordez une vraie importance à la façon dont vous mettez le pied à l’étrier. Pas question de se jeter sur le dos d’un cheval même pas échauffé. Mieux vaut le faire marcher, puis se servir d’un montoir.  Prendre le temps de l’éduquer à l’immobilité préservera le dos du cheval,  les genoux du cavalier et préparera le couple dans au travail.  L’ambiance toujours !
La légèreté se prépare en  utilisant un montoir 
Echauffez votre cheval les rênes longues sans rien lui demander. Contentez-vous d’un échauffement des muscles et des articulations. Il sort de son box, il ne peut donc pas répondre du tac au tac à la moindre de vos sollicitations. Autant ne rien lui demander! Sinon, vous risquez de le solliciter de plus en plus, au risque de le blaser et de saboter vos futures propositions en légèreté. Attendez qu’il soit préparé à l’effort. Quand vous sentez votre cheval prêt, vous pouvez commencer à le mobiliser.
A pied ou monté, le cheval léger réagit à la moindre pression. Pour cela, la clé c’est d’arrêter toute pression au moment même où le cheval cède. « Ce « timing » est particulièrement important ; Sinon, comment le cheval peut-il savoir qu’il a trouvé la bonne solution ? » répète le chuchoteur Andy Booth. On a tous trop tendance à demander et redemander sans attendre la réponse ou sans se contenter d’un début de réponse. Or, si l’on arrête toute pression (les classiques disent céder), dès que le cheval commence à faire le mouvement demandé, tout change! Il suffit même qu’il ait l’idée de le faire pour que l'on cède…
Pas question de brûler les étapes. Sur une échelle de 1 à 10, si on demande avec une intensité 1 et que le cheval ne répond pas. Il faut alors réitérer sa demande avec une intensité 2 et pas directement une intensité 10. En revanche, on s’appliquera à être exigeant dans les moindres détails. Si votre cheval avance d’un pas sans votre approbation, vous le faites reculer d’un pas. Très vite, il comprend. Vous ne vous dites pas, ce n’est pas grave, car la prochaine fois, il avancera de trois pas, voire il vous bousculera. Mieux vaut ne pas entrer dans l’escalade, régler les choses à leur démarrage.
 Et maintenant, en avant ! Pour pouvoir s’exprimer, la légèreté a besoin d’impulsion.  La légèreté, c’est la liberté dans le mouvement. Le cheval est léger quand il ne se sent pas tenu. Il ne se sent pas agressé. Il n’a pas envie de partir. Il est avec nous, en équilibre. 
La légèreté exige une grande précision comme le montre Sophie Bienaimé

Etre léger ne veut pas dire tout lâcher ; On peut monter en licol et être « lourd ».  De même, c’est bien de se promener rênes longues et de laisser au cheval la liberté de son balancier mais si on veut aller plus loin dans le travail, un contact est nécessaire!  « Il ne faut pas confondre la  fausse légèreté où le cavalier sous prétexte de légèreté laisse son cheval flottant et sans impulsion » écrit le célèbre écuyer Nuno Oliviera. Un contact constant  et moelleux avec la bouche reste le graal de nombreux cavaliers. Quand la bouche devient du beurre, c’est le bonheur ! Les anciens assimilaient la légèreté à l’art du contact.  Un art qui s’apprend, se cultive, peut aussi s’improviser mais, toujours, provoque d’intenses émotions. Nuno Oliveira résumait très bien cette quête d’harmonie dans le respect du cheval. « Tâchez de relaxer vos mains et d’avoir un contact léger… Il faut penser à cela, tout devient infiniment plus facile, et ce qui est encore plus important, le cheval en est reconnaissant».
La main du cavalier s’éduque avec… un maître en légèreté ! Philippe Karl, ancien écuyer de Saumur a monté son « Ecole de légèreté » et forme des instructeurs aux quatre coins du monde. Il ne se contente pas de dénoncer  le roll kur et autres "Dérives du dressage moderne", titre de son ouvrage paru chez Belin, il propose une méthode pour notamment, apprendre à avoir une bonne main.  « La légèreté n’écarte aucun type de cheval et n’exclut aucune discipline » écrit-il. Elle suppose la mise en place de trois éléments indissociables et indispensables : décontraction, équilibre, impulsion». Au programme : cessions de mâchoire, pli et extension d’encolure, flexions…  Le rassembler constitue le but et la conséquence de la légèreté. « Tout en procède et tout y ramène » poursuit Philippe Karl.
Nicole Favereau donne une leçon de jambes pour mettre son cheval en avant
Elle peut maintenant le monter en toute légèreté
Des mains éduquées et pleines de tact ne suffisent pas si l’on pousse le cheval en permanence avec ses jambes. La légèreté, c’est aussi un cheval qui écoute les jambes. Il maintient son allure sans qu’il soit besoin de le solliciter sans cesse. Inutile de le relancer à chaque foulée au risque de le lasser, de l’endormir et même de le désensibiliser aux jambes. Mieux vaut donner la fameuse leçon de jambes. On n’a pas trouvé plus efficace.  Il suffit de donner des jambes ou  un petit coup de cravache derrière la jambe s’il ne répond pas, sans oublier d’ouvrir les doigts sur les rênes pour le laisser passer. Parfois, une deuxième leçon peut être nécessaire. Une fois qu’il a compris, le cheval pousse à chaque foulée. Il vient lui-même tendre ses rênes. Pour solliciter peu à peu l’engagement des postérieurs, travaillez sur un cercle. Ecartez la main intérieure, fermez les doigts et demandez un peu de mouvement. Votre cheval va avancer le bout du nez et rencontrer la résistance de vos doigts fermés. Il va céder en baissant légèrement la tête. Cédez aussitôt. Changez de cercle. Elargissez et raccourcissez le cercle. Au début, ne soyez pas trop gourmand. Il faut que votre cheval se gymnastique progressivement. On a toujours tendance à trop demander ! Effectuer des transitions rapprochées dans l’allure et entre les allures le mettra dans l’impulsion. Enfin, des changements rapides d’exercice, de direction et de rythme vont le tenir en alerte.
Pour être léger, il faut être sobre. « Il ne faut utiliser que les forces utiles au mouvement répète  Fabien Godelle, écuyer du Cadre Noir. La position du cavalier est capitale. Il doit être stable pour pouvoir encaisser la force du cheval dans son dos, dans sa posture, pas seulement dans ses mains.  Le corps du cavalier est important. Neuf fois sur dix, on se fâche sur un cheval alors que l’on n’est pas suffisamment rigoureux sur notre propre posture, notre équilibre, notre tension musculaire. L’équitation, c’est un sport ! Il faut tenir son dos ».
C'est plus facile pour un cheval de porter un cavalier échauffé et relâché.

On l’oublie trop souvent !  Se maintenir en condition physique, s’échauffer et s’étirer avant de monter, cela change tout  pour le cavalier comme pour le cheval! C’est bien plus facile pour un cheval de porter un cavalier en forme, souple et délié. Comment atteindre la légèreté si l’on est raide et si l’on tape sur sa selle ?  La préparation physique va de pair avec le contrôle du poids et une bonne hygiène de vie.  « Moins on a de poids et plus c’est facile pour le cheval, explique le docteur Sagnet, chirurgien orthopédiste et cavalier. Pour autant, un cavalier un peu fort peut être léger à cheval. Il ne retombe pas brutalement sur le dos de son cheval au trot enlevé ou à la réception d’un obstacle. Il amortit avec les articulations de ses membres inférieurs (chevilles, genoux, hanches). S’il fait du trot assis, sa colonne lombaire est suffisamment souple.  C’est la colonne vertébrale lombaire et les articulations des hanches qui permettent au bassin de bouger et d’accompagner le mouvement ».
     
Pour Mathieu Noirot, cavalier de CSO, il faut aller dans le sens du mouvement
Même point de vue du coté de Mathieu Noirot, patron des écuries de la Flouquette qui propose non sans humour de limiter les sucreries. « Il faut que le physique suive même si certains cavaliers corpulents se montrent légers à cheval ».  Pour ce cavalier de saut d’obstacles, être léger à cheval c’est « avoir le poids dans ses pieds et pas dans ses fesses que l’on soit assis ou en équilibre. Il faut que le balancier du cavalier suive le mouvement du cheval. On ne doit jamais aller contre le cheval. Les coudes, les épaules, les genoux se plient et se déplient pour suivre le mouvement du cheval.  Si l’on est en retard, on casse le mouvement. Ce n’est plus nous qui suivons le mouvement, c’est le mouvement qui nous rattrape et l’on devient dur. Pour atteindre un bon niveau et ne pas gêner le cheval, il faut accepter d’aller dans le sens du mouvement. La légèreté nait de ce sentiment là. Les mains cèdent; Elles peuvent résister mais pas tirer ».
Etre avec son cheval, aller dans le mouvement, ne demander que ce que l’on peut obtenir, savoir remercier… mais oui, c’est bien à un art de vivre (et de monter)  auquel nous invite la légèreté. Concept qui a fait couler beaucoup d'encre à commencer par le philosophe Xenophon qui l'évoque 350 avant Jésus-Christ!





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